TEXTE A MEDITER
MATIN, MIDI ET SOIR.
La rumeur ouvre ses ailes, elle s'envole à travers nous, c'est une fausse nouvelle, mais si belle, après tout. Elle se propage à voix basse, à la messe et à midi, entre l'église et les glaces, entre confesse et confit. La rumeur a des antennes, elle se nourrit de cancans, elle est bavarde et hautaine, et grandit avec le temps.
C'est un arbre sans racines, à la sève de venin, avec des feuilles d'épines, et des pommes à pépins. Ça occupe, ça converse, ça nourrit la controverse. Ça pimente les passions, le sel des conversations...La rumeur est un microbe qui se transmet par la voix, se déguise sous la robe de la vertu d'autrefois. La parole était d'argent mais la rumeur est de plomb. Elle s'écoule, elle s'étend... Elle s'étale, elle se répand...
C'est du miel, c'est du fiel, on la croit tombée du ciel Jamais nul ne saura qui la lance et qui la croit...C'est bien plus fort qu'un mensonge, ça grossit comme une éponge; plus c'est faux, plus c'est vrai, plus c'est gros et plus ça plaît.
Calomnie, plus on nie, plus elle enfle se réjouit. Démentir, protester, c'est encore la propager. Elle peut tuer sans raison, sans coupable et sans prison, sans procès ni procession, sans fusil ni munitions...
C'est une arme redoutable, implacable, impalpable, adversaire invulnérable, c'est du vent, c'est du sable, elle rôde autour de la table, nous amuse ou nous accable. C'est selon qu'il s'agit de quiconque ou d'un ami.
Un jour elle a disparu tout d'un coup, dans les rues comme elle était apparue, à tous ceux qui l'avaient crue...La rumeur qui s'est tue! Ne reviendra jamais plus dans un cœur...
La rancœur ne s'en ira pas non plus.
Texte d'Yves Duteil
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